BELLADONNA

C’est un peu comme un cadeau : le Cosmograph (ré)ouvre ses portes et, le même jour, ressort sur grand écran cet objet filmique non identifié d’une étonnante intemporalité, que l’on pourrait qualifier de « cosmographique » par excellence. Nous nous permettons d’ailleurs de vous conseiller de ne surtout pas vous fier à la bande-annonce, qui ne reflète absolument pas la richesse de ce bijou d’animation.

Belladonna s’ouvre comme un conte de fée. Sauf qu’il commence à la fin (ou presque) : nous échappons de justesse au traditionnel « ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants »... Jean et Jeanne s’aiment passionnément et ne demandent qu’à être heureux, mais la jeune Jeanne est bien attirante et le beau Jean n’a pas beaucoup d’argent... Ne pouvant pas payer la dot de sa belle, Jean est jeté hors du château où ils s’apprêtaient à fêter leurs épousailles, Jeanne restant seule à la merci des hôtes de ces lieux... La morale de ce conte-là va faire rugir les biens-pensants : le diable rôde, et les humains sont corruptibles... surtout quand ils sont pauvres et soumis par un méchant seigneur... Nous ne vous en dévoilerons pas plus, si ce n’est que le film est à la fois expérimental, poétique, érotique, sensible et visuellement époustouflant ! L’animation combine illustrations fixes, qui prennent vie grâce aux mouvements de caméra, et plans animés qui se fondent les uns dans les autres. Le graphisme est un incroyable mélange de styles et de techniques aussi variées qu’inventives. La musique et les effets sonores créent une ambiance tout à fait unique : tantôt sensuelle, tantôt angoissante voire terrifiante... Belladonna pourrait être la définition même du film psychédélique, tant le fond et la forme s’accordent pour créer l’émotion dans des représentations visuelles hallucinantes de créativité (et hallucinantes tout court d’ailleurs !). Un joyeux bordel absolument culte, immanquable en salle !