MADAME FANG
Du 13/06/2018 au 02/07/2018
LÉOPARD D'OR • FESTIVAL DE LOCARNO 2017
« Filmer est toujours une intrusion. Quel que soit ce qu'il filme, un documentariste envahit un espace. Sans cette intrusion, le cinéma documentaire n'existerait pas. Mais cela n'empêche pas d'avoir du respect pour la mort. Ce n'est pas l'immense souffrance de Madame Fang que je voulais montrer. Je voulais être avec elle, simplement. » Wang Bing
Nous n'entendrons jamais sa voix. Nous la découvrirons furtivement, dans les deux premiers plans du film, debout, en mouvement, mais dès le suivant, tourné quelques mois après, Madame Fang est squelettique, étendue, immobile : sa vie se termine. Ce sont ses derniers jours que nous montre ici Wang Bing, ces instants au cours desquels la présence de cette paysanne du sud de la Chine ne cesse de s'amenuiser. Le documentariste la filme pourtant avec intensité, au plus proche de son souffle devenu difficile. Sa caméra capte également le ballet de ses proches autour d'elle. Dans la pièce où elle repose, la télé allumée en permanence, se succèdent ses enfants et petits-enfants. Ils la veillent, fument, conversent, cherchent les signes annonciateurs de la fin si proche. Les hommes partent pêcher, les femmes restent auprès de la mourante...
Wang Bing choisit de regarder la mort en face : il filme frontalement l'agonie tragique de cette femme ordinaire. Il s'immisce au cœur du tabou – voire du sacré – de ses dernières heures. Les images qu'il nous dévoile alors peuvent sembler triviales mais il s'en dégage quelque chose de profondément humain. Comme si nous faisions la connaissance d'une famille – et à travers elle d'une société – dans des circonstances peu favorables, et s'il nous permettait de rencontrer Madame Fang : une rencontre qui intervient certes tard mais qui n'en est pas moins inoubliable.